L’affaire Claude Jutra a démontré une fois de plus que les professionnels en relations publiques ne doivent pas uniquement prévoir toutes les sortes de crises médiatiques. Ils doivent également élaborer la démarche pour gérer le plus adéquatement possible ces crises.
En l’absence du célèbre cinéaste, décédé il y a trente ans, c’est vers l’organisme Québec Cinéma* que les journalistes ont dirigé leur micro pour réagir aux révélations contenues dans un livre à paraître.
Il aurait été tentant pour Québec Cinéma de crier à l’injustice. Ce n’est certainement pas à eux de devoir répondre à d’aussi terribles allégations à propos de Claude Jutra. Ils ne l’ont pas fait, par ailleurs. Et c’était très bien ainsi. Mais l’organisme devait cependant réagir, car leur prix d’excellence qui récompense le travail des artisans du cinéma portait le nom du cinéaste depuis 17 ans.
La réaction de cet organisme a été solide et mesurée. Les dirigeants de Québec Cinéma ont su ralentir quand tout allait trop vite et donner un coup d’accélérateur quand cela est devenu nécessaire.
Rappel d’une crise qui s’est déroulée en deux temps.
L’approche mesurée
Il y a une semaine, des médias ont obtenu des extraits d’une biographie qui devait paraître quelques jours plus tard. L’auteur, Yves Lever, abordait «le fait que le célèbre cinéaste éprouvait une attirance pour les garçons et aurait eu des relations sexuelles avec des mineurs».
Devant les allégations anonymes d’un livre qui n’avait toujours pas été mis en vente, Québec Cinéma a réagi avec prudence: nous sommes consternés pas les affirmations, a dit en substance leur porte-parole, mais nous voulons prendre le temps de réfléchir. L’annonce immédiate de la création d’un « comité de sages » qui allait réfléchir à la question était la chose à faire. Il fallait répondre présent, mais éviter de réagir trop rapidement. C’est ce qui a été fait.
La réaction rapide et sans ambiguïté
La parution du témoignage d’une victime de Claude Jutra a cependant complètement changé la donne. Et c’est avec rapidité que Québec Cinéma a réagi. Se disant « bouleversés » par le témoignage paru dans La Presse+ le jour même, les membres du conseil d’administration ont voté à l’unanimité un changement du nom de la Soirée des Jutra. Le message était clair et sans ambiguïté.
Visiblement, la stratégie de communication de l’organisme contenait tous les éléments nécessaires pour bien gérer cette crise médiatique, dont les plus visibles:
- l’organisation a rapidement pris ses (justes) responsabilités;
- la communication a été rapide, constante et précise;
- la porte-parole était disponible pour accorder des entrevues;
- l’organisation a su s’adapter à une situation qui a rapidement évolué;
- une solution a été rapidement mise de l’avant : la soirée des Jutra changera de nom.
À quelques semaines du prochain gala, il semble évident que le plus gros de la tempête est passé pour cet organisme. Et leur gestion de cette crise y est certainement pour quelque chose.
* Note : Québec Cinéma n’est pas un client de Consulat relations publiques.
Patrick Howe